Gestionnaire administrative à l’Irma*, Jessica Maurer-Spoerk consacre la quasi-totalité de son temps libre à sa dévorante passion pour le sport. Évoluant au plus haut niveau national de handibasket, rien ne semble pouvoir l’arrêter dans la poursuite de son rêve ultime : porter les couleurs de l’équipe de France.
Sur le fauteuil roulant de Jessica : une peluche « mascotte » Marsupilami, mais aussi un bracelet bleu-blanc-rouge. « Pour toujours garder en tête mon objectif, à chaque match, chaque entraînement », explique Jessica, non sans assurance dans la voix. Et de détailler son emploi du temps : trois entraînements par semaine, un le mardi soir, un autre le jeudi soir, sans oublier celui « de décrassage » du lundi, en dehors de son club. À cela s’ajoutent les matches du week-end, en général le dimanche avec l’équipe 2, le samedi avec l’équipe 1. Dans ces conditions, on comprend que pour la jeune femme de 28 ans, « les mercredis et vendredis soirs libres sont sacrés ! »
Son intégration dans l’équipe 1 de son club, l’Association Strasbourg handisport passion aventure (ASHPA), lui a laissé cette année moins de temps pour aller voir jouer son club favori, la SIG Strasbourg. « Je suis mordue de sport : à la télévision, sur tablette, smartphone… » Et sur le terrain, bien sûr.
« Cerise sur le gâteau »
Son fauteuil « de compétition », qu’elle n’utilise que pour jouer, elle l’a étrenné en 2012, deux ans après avoir intégré l’ASHPA. Son financement de 5 000 € a été permis grâce aux sponsors. Cette année-là a été vraiment déterminante dans son parcours sportif. « J’avais essayé beaucoup de sports, haltérophilie, natation, tennis… » Ce dernier est son « sport de cœur. Mais si on n’est pas classé, c’est un gouffre. » Alors, quand elle reçoit « ce coup de téléphone improbable de la coach de l’équipe de France féminine de handibasket, qui a tout fait basculé », elle analyse cinq ans plus tard : « C’est le basket, que je pratique depuis mes 6 ans, qui m’a choisie ! »
Trois années de suite, elle intègre les sélections pour l’équipe de France, échoue aux portes de l’intégration du groupe restreint des douze. « Je suis passée du rire aux larmes, mais ça fait partie de la beauté du sport ! » Persuadée que le mental fait tout – dans son cas, on n’en doute pas – Jessica intègrera de nouveau les stages de sélection à la rentrée. Tout est possible, sachant que l’équipe 1 de l’ASHPA s’est hissée en nationale 1A cette saison, « l’équivalent de la SIG dans le handisport ! » Habituée à jouer aux côtés des hommes en championnat – « hormis en équipe de France, nous ne sommes pas assez nombreuses pour constituer des équipes » – Jessica avoue avoir craint les « crêpages de chignon des filles. Finalement, je n’ai ressenti aucune concurrence ». Un fair-play qui la convainc que « mon histoire avec le basket serait incomplète sans cette sélection en équipe de France. Ce serait la cerise sur le gâteau ! »
« Dire merci »
Interrogée sur sa persévérance, Jessica, atteinte d’une paraplégie incomplète de naissance, avance : « C’est peut-être lié au handicap, qui m’a donné la volonté d’en faire plus que les autres ». Sa détermination sans faille se double d’un fort caractère : indispensable pour jouer au milieu des hommes. Sur le terrain, ils sont tous « à équité, en fauteuil, tous handicaps confondus », explique Jessica qui, dans la vie de tous les jours, peut aisément s’en passer pour se déplacer.
Très compétitive, elle reconnaît toutefois que la réalisation de son rêve de porter le maillot bleu, avant d’être un accomplissement personnel, serait « pour ma maman, qui m’a adoptée, m’a toujours poussée à me dépasser, notamment grâce au sport. Comme une façon de lui dire merci ».
Elsa Collobert
* Institut de recherche mathématique avancée